Visitons Hambourg !

Groupe "Territoires"

APCVEB: Groupe "Territoires"

Article | 3 février 2019, par Renaud LAURETTE

Au Nord de l’Allemagne, cette ville-état est le deuxième port d’Europe, et son activité économique
est à la fois importante et diversifiée. Sa population fait plus de trois fois celle de Toulouse, et pourtant,
à arpenter ses rues, on est surpris de les trouver si verdoyantes et aérées. A quoi tient donc cette sensation ?
Quelles options ont pris ses édiles dans l’aménagement urbain ? N’y a-t-il pas là quelques sources d’inspiration ?

Un urbanisme récent

Détruite en grande partie lors de la seconde guerre mondiale, Hambourg a du se réinventer, reconstruire et s’étendre,
sa population ayant cru de 200.000 personnes depuis la guerre, pour atteindre 1,8 million aujourd’hui. Si son histoire
est bien différente de celle Toulouse, les deux villes ont en commun une forte croissance sur les 50 dernières années
et un frénésie de construction. Pourtant, l’une et l’autre ont pris des options assez différentes.

Faire ville

Tout comme son territoire, le centre ville d’Hambourg est très étendu. Des immeubles dépassant rarement six étages
longent de larges avenues bordées d’arbres, d’amples trottoirs et de pistes cyclables. Le tout donne, en dépit de la densité
une impression d’omniprésence de la nature, et cette impression se renforce quand on découvre la ville depuis les airs :
les immeubles s’organisent en polygones dont l’intérieur est rempli d’espaces verts partagés entre les habitants du polygone.
On y trouve parfois des potagers, tandis que de l’autre côté de l’immeuble, sur la rue, les boutiques, restaurants et cafés
se succèdent.

Les rues de Hambourg
De larges avenues bordées d’immeubles dépassant rarement quatre étages, dont les rez-de-chaussée sont occupés par des boutiques. Des trottoirs qui comportent des pistes cyclables. Et partout, des arbres.
Le centre ville d’Hambourg vu du ciel
Le réseau routier constitue des polygones dont les côtés sont bordés d’immeubles. Mais à l’intérieur de ces polygones on retrouve des espaces verts partagés, voire des potagers. Au total, la surface comporte pratiquement autant d’espaces verts que de constructions. (Image Google)

Un résidentiel intermédiaire

Tandis que sur le pourtour de la ville se trouvent des quartiers pavillonnaires huppés, la ville propose, entre son centre
et sa périphérie, des espaces résidentiels intermédiaires. Les même polygones sont ici inversés par rapport au centre ville :
les jardins sont en périphérie et les immeubles à l’intérieur. Mais ces immeubles sont plus bas, 2 à 3 étages, et espacés les
uns des autres. Seule constante, les rues sont toujours bordées d’arbres et de pistes cyclables.

Les quartiers résidentiels intermédiaires
Ici, se sont des espaces verts partagés qui bordent les rues et les immeubles se trouvent éloignés des routes. L’ensemble est aéré et donne une impression de campagne alors que la densité reste suffisante pour permettre d’avoir des transports en commun économiquement viables. (Image Google)

Des parcs

La nature n’est pas qu’entre les immeubles ou autour d’eux. De nombreux parcs ponctuent les zones urbaines, et leur taille
évoque davantage celle des parcs londoniens que notre modeste grand rond. Les berges des différents cours d’eau qui traversent
la ville sont des espaces de nature préservés, souvent boisés.

Le parc Planten un Blomen en centre ville
En plein coeur de la ville des grands parcs ménagent des espaces de respiration, de calme et de fraicheur pour les habitants. Leur taille augmente au fur et à mesure que l’on s’éloigne du centre.

Des transports omniprésents

Avec un tel urbanisme, la densité de population est élevée, alors même que l’impression de densité est bien plus réduite que chez nous.
Cet aménagement rend économiquement viable un réseau de transport en commun très dense : des trains, souterrains ou surélevés, assurent
un maillage que complète des bus simples ou articulés. La fréquence de ces derniers a de quoi faire rêver un toulousain : les lignes desservant
les grandes zones d’emploi (le site Airbus d’Hambourg par exemple), sont dotées de bus triples passant toutes les deux à trois minutes ...

Les bus à deux articulations
Des bus hybrides de ce type relient la gare d’Altona au site d’Airbus à raison d’un toutes les 3 mn pendant les heures de pointe matin et soir. On est bien loin de la capacité et de la fréquence ridicules de la ligne 63 à Toulouse (bus simple toutes les 30mn), qui aurait pourtant la même vocation.

Une source d’inspiration pour Gramont

L’expansion actuelle de la métropole toulousaine amène à construire sur des terrains agricoles encore vierges de tout aménagement urbain. Nous avons donc toute latitude pour choisir le modèle le plus opportun de développement, pour autant que nous en ayons la vision. Et Balma, par sa réserve foncière, est particulièrement concernée par cette question.

Vidailhan, comme nouveau quartier affichant une certaine densité, amorce une transition entre le modèle pavillonnaire résidentiel et un quartier de ville. Mais le modèle se cherche : la densité est là, mais pas encore l’atmosphère de la ville, et c’est un peu des inconvénients sans encore vraiment les avantages.

Comparé aux vues de Hambourg, la densité est bien plus faible, et pourtant on a l’impression d’y être à l’étroit : les immeubles sont proches, et les rues étroites. Pas une piste cyclable, pratiquement pas d’arbre, et bien peu d’espace pour faire passer des bus.

Les constructions à venir sur la ZAC doivent redonner de l’air et contribuer à donner de la vie à ce quartier. Et ce n’est pas une collection de pavillons qui y contribuera (voir notre article). L’espace doit être organisé en axes de circulation de différentes tailles : les plus grands accueillant une densité et des commerces, et les plus étroits ouvrant sur du résidentiel intermédiaire.

Laborie : une approche du modèle résidentiel intermédiaire
Parmi les aménagements présents sur Balma, les constructions ayant remplacé l’ancienne imprimerie Laborie sont sans doute parmi celles qui s’approchent le plus du modèle résidentiel intermédiaire illustré à Hambourg. Idéalement, les immeubles pourraient être un peu plus éloignés, au profit de davantage d’espaces verts, quitte à compenser en densité par un étage supplémentaire.

Un modèle pour la métropole ?

Une des différences les plus marquantes entre Toulouse métropole et Hambourg, pour le visiteur, c’est le réseau de transports en commun. A Hambourg, une voiture ne sert à rien : on peut aller absolument partout en train ou en bus, que ce soit pour atteindre une zone d’emploi ou un quartier résidentiel. Et ces réseaux fonctionnent tard dans la nuit.

A Toulouse, combien d’années aura-t-il fallu attendre pour que l’aéroport soit desservi ? Airbus, premier site industriel de France par sa taille ne l’est qu’à peine (le tram dessert le siège mais il n’y a rien pour les usines). Quant aux différentes zones industrielles qui se sont installées en bordure de rocade, elles ne restent accessibles qu’en voiture, tandis que la rocade s’asphyxie d’année en année. Et la troisième ligne de métro n’y changera pas grand chose.

Combien de temps faudra-t-il encore attendre pour disposer d’une infrastructure de transports rapides qui offre une vrai alternative à la rocade ? Là encore regardons chez nos voisins. Les ligne dites "Hochbahn" (train aérien) comportent une infrastructure qui dessert les quartiers en hauteur là où l’emprise au sol n’est plus disponible. Pourquoi ne pas adopter un tel système au dessus de la rocade, et le compléter d’un réseau de bus rapides en étoile connecté à chacune des station de ce train ou de ce métro aérien ? Une telle infrastructure serait moins couteuse et plus efficace que la future troisième ligne.

Le "Hochbahn" : un train aérien
Il circule au dessus de larges avenues comme alternative efficace à la voiture là où manque l’emprise au sol. Pourquoi ne pas mettre en place un tel système au dessus de la rocade toulousaine ?

Du pragmatisme !

Hambourg est une ville parmi bien d’autres. Cet article n’a pas pour objet de l’ériger en modèle à suivre absolument. Mais visiter cette ville permet de prendre conscience des effets que peut avoir une politique résolue en faveur du cadre de vie et de la multiplication des modes de transport.

A la visiter, on mesure à quel point ces politiques ne sont pas encore ancrées dans les actes de nos édiles actuels. Et il est désolant d’observer que nous restons prisonnier de nos erreurs sans sembler pouvoir nous inspirer de ce qui fonctionne ailleurs.

A une époque où les populations affluent massivement vers les villes et où le réchauffement climatique s’affirme comme un enjeu majeur, il est plus que temps de réagir : nous sommes très en retard.

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